Conséquences pratiques de l'unité du corps de Christ

Ladrierre A.

ME 1906 page 32

 

L'Eglise, corps de Christ, n'a pas pu être formée jusqu'à ce que Christ, sa Tête glorifiée, fût dans le ciel. «Car aussi nous avons tous été baptisés d'un seul Esprit pour être un seul corps» (1 Corinthiens 12: 13), de sorte que le corps de Christ n'a existé que lorsque le Saint Esprit a été envoyé du ciel, en conséquence de la glorification de Christ (Jean 7: 39). Une autre chose qui doit frapper le lecteur attentif du Nouveau Testament, c'est qu'il n'est fait mention du corps de Christ que dans les écrits de Paul. Il nous dit d'ailleurs que l'administration de ce mystère lui avait été spécialement confiée (Ephésiens 3: 2-7; Colossiens 1: 25). Le germe de cette révélation se trouve dans les premières paroles que le Seigneur adressa à Paul quand il lui apparut sur le chemin de Damas: «Saul! Saul! lui dit-il, pourquoi me persécutes-tu?» Non pas pourquoi persécutes-tu mon peuple, mais me persécutes-tu? (Actes des Apôtres 9: 4). Nous voyons là la parfaite identification de Christ comme Tête ressuscitée avec ses membres sur la terre, de sorte qu'en persécutant les saints, c'était Lui qu'en réalité poursuivait la rage de Saul. Ainsi, quand plus tard le persécuteur devenu apôtre, développe la vérité relative au corps de Christ, il dit: «De même que le corps est un et qu'il a plusieurs membres, mais que tous les membres du corps, quoiqu'ils soient plusieurs, sont un seul corps, ainsi aussi est le CHRIST» (1 Corinthiens 12: 12). Il représente donc par le terme Christ, Christ et les siens sur la terre comme formant un tout indivisible.

Ainsi la vérité que nous enseigne l'Ecriture est celle-ci: Les croyants sont baptisés par un seul Esprit et placés ainsi dans une union vivante avec Christ, de sorte que Christ et les siens sur la terre forment un seul corps vivant, et c'est pourquoi les croyants sont membres de son corps, de sa chair et de ses os, mots qui indiquent de la manière la plus forte possible l'union vivante et organique des croyants avec Christ, leur Tête ressuscitée, union formée et maintenue par le Saint Esprit.

De là découlent, d'après le dessein de Dieu, plusieurs conséquences importantes que je vais indiquer: 1° Remarquez que les croyants dans une localité donnée, ou plutôt l'assemblée de Dieu dans un lieu donné, est regardée comme l'expression du corps de Christ. Ainsi l'apôtre, écrivant aux Corinthiens, après avoir développé les côtés pratiques du corps de Christ, dit: «Or vous êtes le corps de Christ, et ses membres chacun en particulier» (1 Corinthiens 12: 27). C'est un principe très important qui nous enseigne d'une manière tout à fait explicite, quel est le terrain de Dieu pour le rassemblement de son peuple, c'est-à-dire celui de membres du corps de Christ. En d'autres termes, si les saints d'un endroit sont réunis sur un fondement qui n'admet pas tous les membres du corps de Christ dans cet endroit (sauf ceux qui seraient sous la discipline scripturaire), ce n'est pas le terrain de Dieu. Par exemple, si des croyants se rassemblent comme Wesleyens, Baptistes ou autres dénominations, leur rassemblement ne se fait pas comme membres du corps de Christ. Vous direz: «c'est vrai que nous sommes Baptistes, Wesleyens, ou membres de telle église, mais nous n'aimons pas que l'on exclue personne et en fait, nous recevons tous les croyants». C'est-à-dire que d'autres croyants sont les bienvenus s'ils veulent se soumettre à vos vues, soit de gouvernement ecclésiastique, soit de culte. Cela peut prouver une certaine largeur de sentiments que d'autres n'ont peut-être pas, mais il n'en est pas moins vrai que vous n'êtes pas rassemblés sur la base du corps de Christ, que vous n'êtes pas rassemblés en son nom. Vous tolérez bien ceux qui rejettent vos vues particulières, mais vous ne les regardez pas comme membres, et vous ne leur permettez pas d'exercer un ministère dans vos réunions, à moins qu'ils n'acceptent des vues que beaucoup de chrétiens regardent comme non-scripturaires. Si telle est la base sur laquelle on se rassemble, c'est une négation de l'unité du corps de Christ. Selon l'Ecriture, c'est comme membres du corps de Christ seulement, que les croyants doivent se rassembler, et le nom de Christ est l'unique centre de rassemblement. Ainsi les noms de Baptistes, etc., devraient disparaître, puisque bien des chers enfants de Dieu qui ne s'accordent pas avec les vues indiquées par ces noms se trouvent par là même exclus. Il faut adhérer à une profession de foi, à une constitution, ce n'est pas selon la Parole.

2°  Si l'on est rassemblé comme membres du corps de Christ, on doit laisser place à l'exercice des dons des membres. C'est évidemment la portée de l'argumentation de l'apôtre en 1 Corinthiens 12, et combien ce qui y est dit est différent de ce qui se pratique actuellement. «Car de même que le corps est un, et qu'il a plusieurs membres,… ainsi aussi est le Christ… Car le corps n'est pas un seul membre, mais plusieurs» (1 Corinthiens 12: 12-14). Il montre ensuite qu'aucun membre ne peut être séparé du corps dans lequel il se trouve, que chacun est nécessaire pour le bien des autres, soit le plus faible ou le plus honorable, car «Dieu a composé le corps en donnant un plus grand honneur à ce qui en manquait, afin qu'il n'y ait point de division dans le corps, mais que les membres aient un égal soin les uns des autres». Puis il ajoute: «Or vous êtes le corps de Christ, et ses membres chacun en particulier. Et Dieu a placé les uns dans l'assemblée, d'abord des apôtres, en second lieu des prophètes, etc.» (versets 15-28).

Tel étant le caractère de l'Assemblée comme corps de Christ, composé de plusieurs membres, chaque membre ayant un office distinct, et l'activité de chacun étant absolument nécessaire au bien-être de tout le corps, n'est-ce pas nier l'unité du corps, aussi bien que la fonction et l'usage de ses différents membres, quand des assemblées sont placées sous la présidence et la direction d'un seul homme? Si l'on fait d'un homme, quelque doué qu'il soit, le seul interprète de tout, c'est que, le sachant ou non, on ignore la place des croyants comme membres du corps de Christ. Supposez que je veuille faire accomplir à ma tête ou à ma main toutes les fonctions du corps, ce serait une folie. La folie est encore plus grande quand on s'attend à un «ministre» pour accomplir toutes les fonctions du corps de Christ. Il peut avoir un don ou des dons, en être abondamment pourvu, mais il ne peut remplir les fonctions de tous les membres du corps qui sont là réunis, puisque tous ont des dons différents selon la grâce donnée à chacun. Aussi longtemps donc que dans une assemblée on ne laisse pas place à l'exercice des divers dons que le Seigneur a accordés aux différents membres de son corps, elle ne peut pas dire qu'elle est réunie sur le terrain de l'unité du corps de Christ.

On se place ainsi en opposition directe avec le commandement du Seigneur. En Romains 12, l'apôtre nous exhorte par l'Esprit: «Ayant des dons de grâce différents, selon la grâce que nous a été donnée, soit de prophétie, prophétisons selon la proportion de la foi; soit le service, soyons occupés du service» (versets 6, 7), et sur quoi fonde-t-il l'exhortation? Sur ce fait que, «comme dans un seul corps nous avons plusieurs membres, et que tous les membres n'ont pas la même fonction, ainsi nous qui sommes plusieurs, sommes un seul corps en Christ, et chacun individuellement, membres l'un de l'autre» (versets 4, 5). C'est donc assurément une chose très grave, quand par des arrangements humains, l'exercice du don de plusieurs membres se trouve empêché. Ce n'est rien moins que la désobéissance au Seigneur comme Chef de l'Eglise, et en même temps c'est éteindre l'Esprit.

La chose nous paraîtra tout aussi sérieuse, si nous consultons une autre partie des Ecritures. Nous trouvons dans l'épître aux Ephésiens qu'après son ascension, le Seigneur Jésus a donné des dons aux hommes, et après leur énumération, l'apôtre ajoute que c'est «en vue de la perfection des saints, pour l'oeuvre du service, pour l'édification du corps de Christ».

Si donc l'on se rassemble sur le terrain du corps de Christ, combien on devrait craindre de se départir le moins du monde de ces instructions, avec quel soin, on devrait s'efforcer d'ôter tout obstacle à la réalisation de ce à quoi il a été pourvu pour l'édification du corps de Christ.

3°  Une autre vérité importante est enseignée par l'apôtre, en 1 Corinthiens 10. Il dit: «La coupe de bénédiction… Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain» (versets 16, 17). Nous voyons donc ici que le seul pain est un symbole de l'unité du corps de Christ, et cette unité est aussi manifestée par le fait que tous les membres de Christ formant l'assemblée sont, quand ils se trouvent rassemblés ensemble, participants d'un seul pain. C'est pourquoi le but du rassemblement ensemble, c'était de rompre le pain et par là d'annoncer «la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne». En conséquence, quand nous sommes réunis selon la pensée de Dieu comme membres du corps de Christ, ce devrait être autour de la table du Seigneur, en obéissance à son commandement. Là, outre le souvenir de Christ, nous avons devant nous le pain qui nous rappelle d'un côté son corps donné pour nous, et d'un autre l'unité de son corps, savoir l'Eglise. Aussi voyons-nous que lorsque les premiers disciples se réunissaient le premier jour de la semaine, c'était pour rompre le pain (Actes des Apôtres 20: 7), car ils se souvenaient avec soin du commandement du Seigneur et du fait qu'ils étaient membres du corps de Christ.

Or que voyons-nous en général, le premier jour de la semaine, dans les réunions des diverses dénominations portant le nom de chrétiennes? L'objet est-il de rompre le pain en souvenir du Seigneur? Non, car dans quelques-unes on ne prend la cène, comme l'on dit, que quatre fois l'année; et chez d'autres, une fois chaque mois ou peut-être deux fois par mois. En outre, même alors, le but du rassemblement n'est pas la fraction du pain, car cela est retardé jusqu'après la célébration du service régulier, et est entièrement subordonné à ce qui a eu lieu auparavant. Cela prouve avec évidence que le but principal a été de venir entendre un sermon. Que l'on me comprenne bien. Je ne conteste pas le fait que comme individu, plusieurs de vous, cher frère ou chère soeur, vous ne soyez venus pour adorer, mais cependant la principale chose a été le sermon, c'est ce qui sauterait aux yeux de tout assistant impartial qui se trouverait au milieu de vous sans aucune idée préconçue. La preuve en est la question que l'on entend si habituellement: Qui avez-vous entendu? Quel était le prédicateur? Avez-vous entendu un bon sermon? Il est possible que souvent vous ayez reçu quelque bénédiction par ce moyen, mais il n'en est pas moins certain que, aussi longtemps que vous n'êtes pas rassemblés au nom de Christ autour de sa table, vous n'êtes pas rassemblés comme membres du corps de Christ, et par conséquent ce n'est pas scripturaire, ni selon la pensée et la volonté de Dieu.

4°  Il est donc clair qu'aussi longtemps que les chrétiens sont contents d'être «membres de telle ou telle église» (termes que l'Ecriture ignore complètement), églises toutes distinctes l'une de l'autre, appartenant à diverses dénominations n'ayant aucun lien entre elles, sauf de se reconnaître l'un l'autre par déférence chrétienne, comme appartenant à Christ; rendant culte en divers lieux sous différentes formes, et d'après diverses méthodes, et ayant différentes conditions de communion mutuelle, ils ne peuvent se rassembler comme membres du corps de Christ, ou essayer de garder l'unité de l'Esprit par le lien de la paix (Ephésiens 4: 3).

En effet, puisque tous les croyants sont membres du corps de Christ, et que l'assemblée des croyants dans un lieu est l'expression du corps (1 Corinthiens 12: 27), toute base de rassemblement qui n'admet pas tous les membres du corps simplement comme membres de Christ (sauf ceux qui sont sous la discipline scripturaire), n'est pas la base de l'Eglise de Dieu. En d'autres termes, si on demande autre chose que d'être un membre de Christ marchant dans la sainteté et la vérité, si un nom humain quelconque est adopté, Anglican, Presbytérien, etc.; s'il y a un autre centre de rassemblement, que le nom de Christ; si les dons des différents membres du corps ne sont pas reconnus, ou si leur exercice n'est pas libre selon l'Ecriture, alors l'assemblée où ces choses existent n'est pas l'Assemblée de Dieu, mais de l'homme.

Combien l'on perd en ignorant en pratique cette unité du corps de Christ! Comment réaliser ce que l'apôtre dit: «Si un membre souffre, tous les autres souffrent avec lui». S'affliger de la chute d'un croyant, la sentir comme étant celle de tous, prier pour lui, chercher sa restauration, se réjouir avec lui, quand il l'a trouvée, et ainsi jouir de la bénédiction attachée à la réalisation de cette unité du corps de Christ qui est bien réelle et saisie par la puissance du Saint Esprit! Que saurai-je de la chute d'un frère chez les Wesleyens, les Baptistes, ou les Indépendants, et comment souffrir avec lui? Ce ne pourra être qu'individuellement.

Oh! puissent les chrétiens, après avoir examiné sérieusement et avec prière les Ecritures à ce sujet, se laisser guider dans la vérité par le Saint Esprit, de sorte que, rejetant tout nom et distinctions sectaires, ils se rassemblent simplement comme membres du corps de Christ, et regardant a Lui seul, cherchent dans la simplicité et la dépendance à régler selon les Ecritures, tout ce qui appartient à leur rassemblement!